Parutions

 

Laurent Demanze, Gérard Macé, l'invention de la mémoire, Paris, Librairie José Corti, 2009.

Proses poétiques et biographies imaginaires, rêveries érudites et lectures vagabondes, l'oeuvre de Gérard Macé s'écrit à l'écart des genres. Elle va à rebours du présent et explore les temps antérieurs, non par goût de l'archive, mais pour y puiser des pensées nouvelles. Car Gérard Macé ne sépare pas l'invention et la mémoire, dans des livres où la fiction et les souvenirs, l'essai et la rêverie se confondent. Il s'invente une mémoire comme on endosse un costume d'emprunt, et réenchante son passé à mesure qu'il s'enfonce dans ses lectures. Le réel et l'imaginaire, le familier et l'étranger s'échangent alors, en brouillant les identités au fil des pages tournées. Pourtant, Gérard Macé ne s'égare pas seulement dans le labyrinthe des bibliothèques, puisqu'il invite au dépaysement, dans les détours du voyage ou les décentrements de la traduction. Il puise à l'exactitude du concret, transcrit un détail attesté ou s'aventure dans les sciences humaines, pour dire le monde avec lucidité. A la manière des colporteurs, il mêle la précision des savoirs et l'enchantement de la rêverie, avec le souci de la trouvaille. Mais transposer ses souvenirs ou saisir le réel dans ses photographies, consigner ses lectures ou partir dans le sillage des explorateurs, c'est toujours élaborer une poétique de la mémoire. Car c'est l'ébranlement d'une rencontre qui conditionne le retour du passé et permet de célébrer les retrouvailles.

 

 

 

Dominique Viart et Dominique Rabaté (dir.), Écritures blanches, Saint-Étienne, Presses universitaires de Saint-Étienne, 2009.

La notion d’« écriture blanche », avancée par Roland Barthes dans Le Degré zéro de l’écriture, à propos de Camus, Cayrol et de Blanchot, a connu et continue de connaître une fortune critique importante. Légitimement étendue aux oeuvres de Perec, Ernaux, Bove, Duras, comme à la poésie anti-lyrique, revendiquée par les uns mais contestée par les autres, cette catégorie est désormais invoquée pour désigner des formes et des genres d’écriture et des choix stylistiques très divers. Dans un dialogue original entre études critiques et paroles d’écrivains (Annie Ernaux, Leslie Kaplan, Emmanuel Hocquard, Christian Oster et Antoine Emaz), le présent ouvrage déploie l’histoire et la théorie de cette notion critique, envisage ses applications, ses valeurs métaphoriques et ses frontières avec les autres arts, notamment avec le « minimalisme » plastique et la photographie. En posant la question cruciale du style littéraire dans la littérature contemporaine, il permet ainsi de cerner pour la première fois une notion capitale dans les enjeux esthétiques d’aujourd’hui.

 

Etude l'oeuvre de François Bon par Dominique Viart, dans la collection de Bordas, "La littérature au présent". Un compte rendu de ce livre est disponible sur Fabula.

 

La Littérature française au présent

 

 

 

 

 

Dominique Viart, Bruno Vercier, La Littérature française au présent, Paris, Bordas, 2008 [2005].

     Objet de polémiques et d'enthousiasmes, la littérature française s'est profondément renouvelée depuis la fin des années 1970. À nouveau en prise sur le monde, elle suscite les débats, les interrogations. Des formes inédites sont apparues, des écrivains de talent se sont imposés, bousculant les usages littéraires. Comment comprendre ce qui s'écrit aujourd'hui ? En invitant à découvrir les oeuvres les plus fortes de notre temps, cet ouvrage montre la prodigieuse vitalité d'une littérature mal connue. Il en souligne les richesses et dévoile les nouveaux enjeux de l'écriture face au monde contemporain.

Laurent Demanze, Encres orphelines: Pierre Bergounioux, Gérard Macé, Pierre Michon, Paris, Librairie José Corti, 2008.

        

Dans un temps de transmission empêchée et de tradition morcelée, la littérature contemporaine interroge les figures évanouies de l’ascendance. Tour à tour investigation généalogique et restitution biographique, les livres de Pierre Bergounioux, Gérard Macé et Pierre Michon s’écrivent à rebours de l’amnésie moderne. Car la modernité fait peu de cas des heures révolues et des êtres minuscules, des héritages secrets et des filiations traversières. Entre inquiétude et mélancolie, ces trois auteurs se ressaisissent d’un passé familial lacunaire, dans un souci de mémoire aux couleurs de deuil. C’est la mélancolie qui taraude ce livre. La mélancolie d’écrivains qui ne se résignent pas à faire le deuil des temps désuets. La mélancolie aussi de leurs récits de filiation, où se dit la figure fin de siècle d’un individu hanté par les fantômes de l’ascendance et par leurs désirs inaccomplis. La mélancolie, enfin, d’une mémoire encombrée par les souvenirs de lecture et l’aura des livres d’autrefois. C’est elle qui donne à ce livre sa tonalité funèbre, c’est elle encore qui module dans les textes de Pierre Bergounioux, Gérard Macé et Pierre Michon l’élégie d’un monde disparu. Mais cette teinte sombre, qui colore leurs écritures, ne se réduit pas aux inflexions de l’humeur ni aux sombres cogitations. Elle est aussi une passion de l’altérité, qui recueille les destins déshérités de l’ascendance et restitue leur éclat singulier. Il y va ainsi dans cette mélancolie contemporaine d’une éthique de la littérature.

 

Deux comptes rendus sont disponibles sur internet, au cnl d'abord et auprès de l'ambassade de France.

© 2009 Laurent Demanze